Le roi du souper
Émile Nelligan
Grave en habit luisant, un grand nègre courbé,
Va, vient de tous côtés à pas vifs d’estafette :
Le paon truffé qui fume envole une bouffette
Du clair plateau d’argent jusqu’au plafond bombé.
Le triomphal service au buffet dérobé,
Flambe. Toute la salle en lueur d’or s’est faite ;
À la table massive ils sont là pour la fête,
Tous, depuis le grand-oncle au plus petit bébé.
Soudain, la joie éclate et brille, franche et belle :
Le dernier-né, bambin qui souvent se rebelle,
Se pose sur la nappe où fleurit maint détail.
On applaudit. Sambo pâmé s’en tient les hanches,
Cependant que, voilant son chef sous l’éventail,
Grand-mère essuie un peu ses deux paupières blanches.
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